Fanfiction Diablo II

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La corrompue

Par Exar-Kun

Prologue

Chapitre 1 : Le Conseil

Chapitre 2 : La Guerrière Flamboyante

Chapitre 3 : Carnage sous les Etoiles

Chapitre 4 : Une altercation malvenue

Chapitre 5 : Première Confrontation

Chapitre 6 : La tanière

Chapitre 7 : Rituel Impie

Chapitre 8 : Trahison

« Voilà déjà trois jours qu'ils me traquent, ou du moins pensent me traquer. Ils m'ont suivis jusqu'au Bois Obscur, sans se rendre compte qu'ils couraient à leur perte, les imbéciles... »

La température était brutalement tombée par cette obscure nuit d'hiver. La troupe d'hommes en arme ressentait plus que jamais la morsure du froid qui s'infiltrait sous leurs vêtements. Depuis trois jours ils étaient à la poursuite de la Corrompue, celle qui commettait tant d'atrocités depuis déjà deux ans dans la région. La dernière ferme à tomber sous une de ses attaques avait été la goutte d'eau de trop. Cette fois le prêtre du village avait réunis une troupe d'hommes d'armes pour en finir une bonne fois pour toutes. Contre l'avis du doyen il avait préféré réglé lui-même cette affaire plutôt que de devoir prévenir l'Ordre de la Sororité de l'Oeil Aveugle, au moins ces mercenaires feraient leur travail sans poser de questions indiscrètes.

« Bien, il est temps pour vous... il est temps de mourir mes misérables petits pantins. »

L'attaque surgit des airs, fulgurante, sous la forme d'une griffe effilée qui se planta dans la gorge de l'homme de tête et le souleva dans les airs lui déchiquetant la gorge. Déjà, un autre homme tombait mortellement touché au coeur. Les trois survivants se regroupèrent dos à dos, essayant de deviner où se cachait leur proie, ou plutôt leur prédateur, les rôles ayant été inversés en quelques secondes. La peur commença à oeuvrer. La nuit était devenue d'une noirceur d'encre. Pourtant habitués aux expéditions nocturnes, ils se révélaient incapables de voir au bout de la lame de leurs épées. Un projectile tranchant mis fin à l'angoisse d'un des trois survivant se plantant dans son front avec un craquement sinistre suivit de près par un cri qui déchira le silence de la nuit. La peur est mauvaise conseillère, et le plus jeune des deux derniers l'appris à ses dépends, quand, prenant la fuite il fût intercepté par un violent coup dans la gorge qui lui coupa le souffle. Rapidement il ressentit une violente brûlure au ventre et tomba à genoux en essayant de retenir ses entrailles qui jaillissaient de sa blessure.

- Il ne reste plus que toi maintenant, dit-elle avec une voix à faire geler les pierres. Que comptes-tu faire ?

Elle sortit de l'ombre faisant face au dernier des cinq hommes qui se tenait dos à un rocher, son épée en garde. Elle était presque belle, pensa-t-il ou du moins elle avait été très belle dans le passé. Maintenant il avait en face de lui un masque de haine et de cruauté, et sa façon de se déplacer furtivement et de bouger ses membres était des plus sinistre, rappelant à la fois le loup et le reptile. Il n'avait pas peur d'elle. Il avait déjà combattu des monstres dans la jungle du Kehjistan et avait survécu à de nombreux combats. Il était néanmoins impressionné par cette créature qui évoluait devant lui, à la fois belle et dangereuse, comme les membres de l'ordre des Assassins, dont il avait déjà croisé le chemin à quelques reprises.

- Et bien je compte te tuer, comme on me l'a demandé, finit-il par dire, ne la quittant pas des yeux, tous les sens en éveil.

- Qui te l'a demandé ? répondit-elle avec une lueur de folie dans ses yeux.

- Je n'ai pas pour habitude de répondre aux questions de mes cibles, mais saches que l'on me paie suffisamment pour que je ne pose pas de questions, et disant cela il raffermit sa prise sur la garde de son épée.

- Alors meurs ! hurla-t-elle avant de se jeter sur lui à la vitesse de l'éclair.

S'attendant à cet assaut, il banda ses muscles prêt à recevoir le choc, qui ne vint pas. Prenant un contre appui, elle fît un brutal bon de côté projetant l'un de ses dangereux projectiles droit dans la jambe droite de son adversaire, qui l'esquiva de peu. Il ressentit soudain un choc sur son crâne, ou plutôt dans son crâne, cette impression que son cerveau se disloque. Titubant en arrière, tentant de reprendre ses esprits il vit à travers un voile une ombre foncer droit sur lui. Il se fendit en avant, frappant de taille droit devant lui. Malheureusement son épée ne rencontra que le vide, et un violent choc sur ses avant-bras suivit d'une douleur atroce lui apprirent qu'il venait de se faire trancher les membres. Il n'eût guère le temps de hurler, une main se referma brutalement sur sa gorge, étouffant son cri. La dernière chose qu'il entendit fût le craquement de son larynx broyé. Perdant l'équilibre il s'écroula dans la neige et sombra dans le néant pour l'éternité.

Une série de hurlements secoua la nuit, celle que l'on nommait la Corrompue avait encore frappé et elle le faisait savoir à tous. Regagnant sa tanière, la Corrompue repensa à cet homme qu'elle venait de tuer. De façon étrange elle lui avait parlé, ce qu'elle ne faisait d'habitude jamais avec ses victimes. Elle avait ressentit quelque chose de différent en lui, différent de ces minables paysans qu'elle aimait massacrer au clair de lune. Elle se dit que si des mercenaires en avaient après elle c'est qu'il devait y avoir quelqu'un de riche derrière, ou de suffisamment puissant pour louer leurs services. Tout se recoupait à présent, si le gros gibier commençait à se montrer alors l'heure de la vengeance avait enfin sonné pour elle.
- Il sont tous morts, annonça le doyen du village.

Sa voix tomba comme le couperet d'une hache. Les corps avaient été retrouvé mutilés et éparpillés sur une trentaine de mètres au petit matin par une troupe de paysans ayant accepté de s'aventurer dans le Bois Obscur, qui, même en plein jour était évité comme la peste du fait de sa proximité avec le repaire de la Corrompue, ledit repaire que personne n'avait jamais réussit à localiser.

Un conseil extraordinaire s'était réunit ce matin là au village de Dagorlad, composé du prêtre Edicius, du doyen Marius, du chef de la milice locale Krager et du médecin du village Wilgard, qui bien qu'il n'y ai guère eu de survivants aux attaques de la Corrompue devait faire face à des épidémies soudaines inexpliquées.

- Nous ne pouvons pas continuer comme çà, poursuivit-il. Il est temps de faire appel aux Soeurs de l'Oeil Aveugle, elles seules sauront combattre ce démon.

- Nous n'avons pas besoin de ces femelles en manque pour venir à bout de cette abomination, explosa Krager. J'en fais mon affaire, et croyez-moi elle ne s'en sortira pas cette fois.

- Vingt-cinq de vos hommes sont morts en tentant de la tuer, vous ne serez qu'une victime de plus à son palmarès, dit doucement Wilgard, qui malgré sa jeunesse étonnait souvent par son assurance et son franc parlé.

La situation n'était guère brillante au village depuis quelques jours, pour ne pas dire catastrophique. En effet, la milice était régulièrement allégée par de nouvelles disparitions, et à ce jour elle ne comptait plus que douze membres sur trente-sept. La population avait, elle aussi, souffert de lourdes pertes pendant l'automne de cette année qui avait suivit la défaite du Seigneur de la Terreur dans les catacombes de Tristram. La plupart des hommes valides ne l'étaient plus, et même les femmes et les enfants étaient pris pour cible.

- Sale petit con, hurla Krager en se levant brutalement de son siège, attrapant Wilgard à la gorge.

- Suffit ! Krager laissez le. Tout de suite !

Son apparence chétive détrompait souvent les étrangers, pourtant Edicius avait juste cinquante ans, et une aura de puissance émanait de lui, vestige de son apprentissage de paladin au temple du Zakarum. Il savait intimé le respect, et dans les conditions actuelles c'était plus que nécessaire.

Obéissant à contrecoeur Krager lâcha Wilgard et se rassit, gardant les yeux fixés sur le jeune médecin. S'ils avaient pu projetés des éclairs, le jeune homme aurait ressemblé à un tas de cendres.

- Ces chamailleries sont dignes de vos miliciens avinés Krager, pas d'un chef responsable, tonna-t-il.

- Il est clair que nos hommes sont totalement dépassés par les évènements, reprit le doyen. Nous ne pouvons faire face à cette furie sans aide. Les rogues, n'en déplaise à notre fier guerrier ici présent, sont entraînées pour cela, et ce depuis bien longtemps.

- De toute façon sans aide, je ne pourrais bientôt plus faire face aux vagues d'épidémies qui touchent les villageois, argumenta Wilgard. J'ai entendu les rumeurs qui courent. La terre est malade, l'eau a changé de goût. Elle nous empoisonne tout doucement et si nous ne réagissons pas vite, elle nous aura à l'usure, dans l'hypothèse où les villageois ne décident d'agir eux-mêmes.

- Ces fous de paysans ne sont qu'un ramassis d'imbéciles congénitaux, cracha Krager. Ne me dites pas que vous les croyez mon père ?

- Je pèse le pour et le contre mon fils, répondit doucement Edicius, et j'en arrive à la même conclusion que Marius, nous ne nous en sortirons pas seuls. Dès demain, je partirai pour le Monastère des Rogues avec une petite escorte. J'aviserai les Soeurs de nos soucis et leur demanderais un soutien armé.

- Jamais je ne me laisserai commander par ces sorcières ! gronda le milicien. Je vais de ce pas m'occuper de cette horreur moi-même.

- Je creuserai une tombe pour vous, susurra Wildgard pendant que le chef de la milice sortait en trombe de la salle du conseil.

« Ils ont décidé de bouger... Enfin... Ce moment je l'attends depuis si longtemps, oh oui depuis si longtemps... »

Pensant cela, celle que l'on nommait la Corrompue se laissa tomber à genoux, et brutalement, des souvenirs jusqu'à présents enfouis au plus profond d'elle même ressurgirent, lui rappelant celle qu'elle avait été il y a quinze ans et son périple jusqu'ici. Tant de pensées inavouables, de crimes, de massacres qui avaient jalonné son parcours. Prise dans le tourbillon de ses pensées, elle sombra dans une torpeur où se chevauchaient rêves et souvenirs, espoirs et craintes.

Combien de temps resta-t-elle comme çà ? Elle ne le sût jamais. Elle s'éveilla à la lumière de la Lune baignant son visage blême. Elle se redressa, tout les sens en éveil, et s'éloigna d'une foulée rapide et silencieuse en direction d'une des ferme éloignée du village. Ce soir elle allait se régaler de chair fraîche.
- C'est pourquoi nous avons besoin d'une aide rapide, conclut Edicius.

Cela faisait près d'une heure qu'il était arrivé au monastère des Rogues. Devant son empressement il avait été reçu presque tout de suite par la grande prêtresse Akara. Il lui avait développé la situation dans son intégralité, sans omettre les massacres les plus sordides, ce qui joua en sa faveur.

- Bien, la voix de la prêtresse était claire et ferme, si je comprend bien vous avez à faire à un démon de sexe féminin qui harcèle votre village. Vous avez été très pointilleux sur ses actions, néanmoins une question me vient inévitablement : pourquoi ?

- Je ne suis pas sûr de bien comprendre, répondit Edicius.

- Je me demande pourquoi elle s'en prend à vous et à votre village.

Depuis un moment, elle sentait que la personne qui se tenait devant elle lui cachait quelque chose. Cet homme, avec tout le respect qu'il inspirait, ou devait inspirer, ne semblait pas tout à fait sincère avec elle. Pourtant, les marques de l'ordre du Zakarum étaient garantes de la pureté et de la loyauté de cet homme envers la justice. Malgré cela, elle avait déjà arrêté sa décision depuis déjà de longues minutes.

- L'Ordre de l'Oeil Aveugle vous apportera tout son soutien dans cette affaire. Nous vous transmettrons une aide en matériel, ainsi que certaines de nos Soeurs pour protéger. J'ai fait appelé l'une de nos meilleures combattantes, qui revient de Tristram.

- Tristram ? la voix du prêtre monta d'un ton involontairement, il se reprit vite. Vous voulez dire qu'elle a combattu les armées du Seigneur de la Terreur ?

- Absolument, répondit Akara. Elle est revenue depuis quelques mois au monastère et est un exemple pour nous toutes. Elle vous sera d'une aide précieuse, car elle connaît de nombreux démons ainsi que leurs pouvoirs.

- J'en suis sûr, murmura Edicius, qui en son fort intérieur commençait à regretter d'être venu dans ce lieu.

La porte s'ouvrit sur une splendide créature, haute d'un bon mètre quatre-vingt, de carrure imposante pour une femme, sans toutefois perdre en grâce. Elle se déplaçait silencieusement sur les dalles du bureau de la grande prêtresse et son assurance dénotait une très forte personnalité. Ce qui le choqua le plus, outre ses cheveux d'un roux flamboyant, furent ses yeux étincelants. Il avait rarement vu cela chez une femme, des yeux dorés qui brillaient dans la demi obscurité de la petite pièce.

Chassant des pensées indignes d'un homme de son rang, il se focalisa sur elle. Son instinct de paladin ne l'avait jamais vraiment quitter, même après toutes ces années passer à l'Ouest de la splendide Kurast. Il ressentit chez elle une impression étrange, floue. Elle se tenait droite devant lui et restait au garde-à-vous devant son chef.

- Je vous présente la soeur Blood Raven, annonça Akara. Elle vous aidera à combattre ce démon qui tue vos ouailles. Vous pouvez avoir toute confiance en elle, elle mènera une troupe d'une dizaine de soeurs, pour assurer la protection de Dagorlad.

- Soyez rassuré seigneur, si ce démon est malin il partira vite avant notre arrivée, dit-elle d'une voix où pointait une certaine arrogance. Ils aiment terroriser leurs victimes, mais ils ne sont pas stupides et savent reconnaîtrent leur infériorité.

- L'affaire est donc entendue, conclut Akara. Soeur Raven, vous repartirez avec le père Edicius et une escorte de dix de nos soeurs, et vous avez mission de mettre fin aux agissements de ce démon, de manière définitive.

- Il en sera fait selon vos désirs, grande prêtresse, répondit-elle en s'inclinant respectueusement.

Le voyage de retour fût très éprouvant pour Edicius, qui se réfugia dans un silence buté. Il sentait quelque chose en elle qui n'allait pas avec sa charge et son grade. Pourtant, en tant que Capitaine des Rogues, elle était au-dessus de tout soupçons. Sa beauté l'obsédait, ce qui n'arrangeait rien à la situation. Avec cela rejaillissaient des souvenirs déplaisants qu'il croyait oubliés depuis de nombreuses années.

Il ne pouvait détacher son regard du corps de cette femme, aux courbures harmonieuses et à la fermeté délicieuse. Tout en elle éveillait le désir, les reflets flamboyants de sa chevelure, ses yeux dorés étincelants d'une volonté d'acier, sa démarche volontaire et sensuelle à la fois, sans oublier son visage qui s'illuminait parfois d'un sourire à damner un saint.

Surprenant l'un de ces regards, elle se tourna vers lui et le fixa avec intensité, et là il comprit ce qui n'allait pas chez elle. Son regard n'était pas celui d'une guerrière dévote, c'était celui d'une tueuse qui fixe sa proie. Il détourna vivement la tête, s'intéressant subitement aux branches des arbres voisins de la route. Il pouvait toujours sentir son regard brûlant et essaya de ne rien laisser transparaître aux autres hommes du village qui, eux, savaient qu'il valait mieux ne pas se frotter aux Soeurs de l'Oeil Aveugle.

L'arrivée au village fût comme dans un rêve, les habitants sortirent de chez eux pour accueillir la troupes des sauveurs. Edicius ne manqua pas de remarquer l'absence de Krager, mais ce qui le toucha le plus ce fut celle du jeune médecin. Visiblement il y avait encore eu des disparitions depuis son départ. Il ne fut guère surprit d'apprendre qu'une ferme avait été détruite et toute la famille y habitant massacrée. Il se demanda alors quand ce cauchemar cesserait, si tant est qu'il cesse un jour.
Le coup de genoux lui cassa encore deux côtes. Il n'eut pas le temps de réagir qu'un violent coup manqua lui arracher la tête, le projetant deux mètres plus loin dans la neige. Il L'avait retrouvé plus vite que prévu et commençait à regretter sa folle témérité. Il se releva avec peine, banda tous ses muscles et se rua sur Elle avec férocité la fauchant avec un violent placage à la poitrine, l'envoyant contre un arbre.

Le combat était d'une férocité rarement vue. Les deux combattants luttaient de toutes leurs forces dans cette clairière éclairée par la lumière blafarde de la Lune et de quelques étoiles. Les armes avaient très vite été inutiles, les adversaires ayant préféré faire confiance à leur force brut. Krager n'aurait jamais cru qu'Elle fût si forte et si rapide. Il avait combattu contre de nombreux adversaires, parfois des monstres redoutables et cette créature là le tenait en échec par sa simple force. Pour une raison inconnue Elle n'avait pas utilisé certains des pouvoirs que lui prêtaient les villageois, comme si Elle voulait faire durer cette lutte.

Les bruits de la lutte se faisaient entendre jusqu'à l'orée du Bois Obscur, alternant ahanements de l'un et cris féroces de l'Autre. Le ton commença néanmoins à changer au bout de quelques minutes de combat acharné, lorsque Krager trébucha sur une branche. Tout se passa alors très vite, Elle lui saisit le bras et le lui tordit, le traînant au sol par la simple force de son élan. Krager poussa un hurlement lorsque son bras se brisa avec un craquement légèrement humide au niveau se son épaule droite. Incapable de se redresser, il envoya sa tête en arrière, la frappant sous le plexus solaire.

Elle relâcha sa prise un bref instant, suffisant pour permettre au milicien de se relever et de se remettre en garde, son bras droit pendant le long du corps. Il comprit, en croisant Son regard halluciné, qu'il avait perdu. Il n'avait pas su comprendre à temps les avertissements du jeune Wilgard et était tombé dans un piège. Il allait mourir bientôt et ne pouvait rien faire. La fuite ? Inutile d'y penser, elle le rattraperait vite. La lutte ? Avec un bras en moins, le principal de surcroît, il ne tiendrait pas longtemps. Négocier ? Pourquoi pas...

- Attends ! cria-t-il, pourquoi est ce que tu fais tout çà ? Bon Dieu mais qu'est ce qu'on t'as fais ?

- Ce que vous m'avez fait... murmura-t-elle d'une voix sifflante.

Elle poussa soudain un hurlement déchirant, et se rua sur Krager avec toute la force de sa haine. Il comprit, un peu tard, qu'il avait fait le plus mauvais choix de tous. Elle se déchaîna sur lui, le rouant de coups, lui brisant les os, lui déchirant la peau dans le concert des hurlements du supplicié. Au bout d'une minute elle parvint à se calmer et à reprendre emprise sur elle-même. Se forçant à s'éloigner de lui et à reprendre son souffle, elle chassa tous les souvenirs qui l'avaient une nouvelle fois submergés.

- Tu va me le payer très cher, souffla-t-elle. Toi le sale porc puant ! Je vais te faire regretter d'être venu au monde, et surtout d'avoir croisé ma route.

- Mais bon Dieu qui es-tu ? parvint-il à articuler.

- Cherches bien dans ta mémoire et tu trouveras, répondit-elle avec un sourire dément accroché à son visage blafard. Oui, c'est bien une phrase de ton Dieu n'est ce pas ? « Cherches et tu trouveras ». Alors cherches ! Tu va en avoir le temps pendant que je m'occuperai de toi...

Il n'eut même pas envie de savoir ce qu'Elle entendait par là. Il était épuisé, las. Tentant une dernière chose, il se mit à genoux et supplia, une chose qu'il n'avait jamais faite de toute sa vie. Il la supplia d'épargner sa vie. Alors il comprit qu'il venait de commettre la dernière erreur de toutes, la pire, quand elle lui répondit.

- Et moi ? Tu m'as épargné quand je t'ai supplié ?

Disant cela, elle ramassa un de ses couteaux et s'approcha de lui. Il tenta vainement de résister avec son dernier bras valide, mais il était trop tard maintenant, elle était parfaitement maîtresse de ses actions et toute la haine de l'enfer flamboyait dans ses yeux. Mephisto le Seigneur de la Haine lui-même n'aurait rien eu à lui envier à cet instant.

Elle lui planta son poignard à la base de son épaule lui sectionnant les tendons de son bras gauche. C'est avec une terreur incommensurable qu'il la sentit lui extraire la langue de la bouche et la trancher avec une lenteur calculée. Se débattant de plus belle, il parvint à se libérer provisoirement et tenta de fuir ce démon tortionnaire. Sa première pensée avait été la bonne, elle le rattrapa vite, lui fit un croche-pied, et il tomba lourdement sur le sol gelé. Elle le retourna sur le dos et s'assit à califourchon sur son ventre, lui saisissant la gorge dans ses mains crochetées.

- Regardes bien ton oeuvre, espèce de pourriture innommable ! hurla-t-elle, et, retirant son armure légère, elle dénuda sa poitrine sous les yeux ahuris de Krager.

C'est alors qu'il comprit. Il venait de comprendre le qui, le comment et le pourquoi de cette hécatombe. Alors il repensa à ce lointain passé, et revit toute l'histoire. Une histoire sordide et répugnante, un souvenir à jamais enfoui dans sa mémoire et disparu de la surface de la Terre. A l'époque il en avait tirer un plaisir physique et mental au-dessus de toutes ses précédentes aventures. Et aujourd'hui les rôles étaient inversés, c'était lui qui était à sa merci. Il ne verrait pas le jour se lever, sa vie s'achèverait dans ce Bois Obscur. Soudain elle colla sa bouche à son oreille, dans une position presque sensuelle, et lui murmura une simple phrase, mais ô combien lourde de signification. Il réalisa alors avec horreur que son calvaire ne faisait que commencer.
Wilgard observait tranquillement la Corrompue, en train de torturer Krager, et réfléchissait. Il avait deviné depuis longtemps qu'il y avait quelque chose de louche dans ces attaques aveugles et spontanées. Maintenant il comprenait mieux, même s'il n'avait pas entendu la phrase qu'elle avait murmuré... Il jeta un dernier coup d'oeil au corps du milicien, toujours vivant après plus d'une heure de torture gratuite, secoué de spasmes, avant de se retourner et de s'éloigner vers le village. Il n'avait jamais eu de sympathie pour cet homme vulgaire et violent, toujours prêt à mépriser le faible et à tirer parti de sa supériorité physique. Aujourd'hui l'heure des comptes avait sonné, et c'est avec un certain plaisir qu'il avait assisté à sa défaite et à une partie de son agonie.

Trop occupé à extraire les viscères de sa proie, Elle ne l'avait pas entendu s'éloigner. Le jeune médecin n'était pas discret quand il suivait quelqu'un, et Elle était intervenue juste avant que Krager ne s'en prenne à lui, camouflant son approche grâce à sa présence. De toute façon elle décimerait tout le village, et ce jeune homme ne ferait pas exception, même si elle le trouvait plutôt à son goût. Elle lui réserverait probablement un sort tout particulier, une des dernière choses lui procurant un plaisir physique intense.

De retour au village, Wilgard remarqua tout de suite que l'atmosphère avait changé. Les villageois s'affairaient autour de barricades sous la direction d'une femme magnifique aux cheveux flamboyants. Il reconnut une rogue, et décida de se rendre à son cabinet dans l'hypothèse où une personne ait réussi à survivre à une visite de la Corrompue. Ruminant ses pensées, il ne se rendit pas compte qu'il était suivit. A peine fût-il entré dans sa maison, petite bâtisse simple mais tout de même agréable, qu'une poigne d'acier se referma sur sa gorge. Il fût projeté en avant par un violent coup de genoux dans les reins, et boula par terre dans un fracas abominable de récipients et accessoires brisés.

- Alors, dit une voix sensuelle, on est allé se promener dans le Bois Obscur ?

Le jeune homme se releva avec peine et regarda la femme qui se tenait face à lui. Il ne pu retenir un sourire à la vue de cette créature magnifique quand il la détailla de bas en haut. Sourire qui se figea lorsqu'il croisa son regard, celui d'un tueuse impitoyable, ses yeux dorés la rendant encore plus irréelle.

- Tu trouves que j'ai l'air amusante ? sa voix n'était plus qu'un filet de venin.

- Pas du tout, répondit Wilgard de la voix la plus assurée qu'il pouvait. En fait je souris parce que je trouve la situation cocasse.

- Vraiment ? ses yeux n'étaient plus que deux fentes luisantes.

- Tout à fait, dit-il en se relevant avec peine. C'est la première fois qu'une femme fait irruption chez moi de façon aussi violente.

- Que faisait-tu dehors ? demanda-t-elle.

- Je cherchais des herbes médicinales, répondit immédiatement Wilgard. Et il y en a dans le Bois Obscur.

- Où sont-elles tes herbes ? Je n'en vois pas.

Imperceptiblement, sa main droite se rapprocha de sa ceinture où se trouvait un poignard. Wilgard se dit qu'il devait absolument faire quelque chose, sinon elle allait le tuer sans autre forme de procès. Il fût coupé dans sa réflexion intense par l'entrée en trombe d'Edicius.

- Que se passe-t-il ici ? demanda-t-il.

Sa voix était forte et il avait un glaive à la main, chose rare chez lui. Il avait entendu du bruit dans la maison du médecin, après avoir vu Blood Raven y entrer. Il s'était précipité sur son arme d'apprenti et avait couru porter secours au jeune homme.

- Rien de bien méchant, assura tout de suite Wilgard. Juste une méprise.

- Un peu violent pour un méprise, remarqua le prêtre en remarquant l'ecchymose qu'il portait au niveau du cou. Soeur Raven, je serai gré de ne plus jamais recommencer ce genre de plaisanterie.

Il avait insisté sur le « jamais » tout en assurant sa prise sur la garde son glaive. Blood Raven évalua la situation et se dit qu'il ne valait mieux pas provoquer un massacre ici, même si ce soi-disant médecin avait une belle tête de traître et que ce prêtre était décidément bien peu ordinaire, tant dans son attitude que dans ses propos. Elle sortit sans un mot et claqua la porte derrière elle. Elle était décidée à venir à bout de ce démon le plus vite possible, avant qu'il n'arrive à corrompre les mortels de cette place.

- Je peux savoir ce que vous faisiez dehors ? demanda Edicius d'une voix où perçait la colère, pendant que le jeune Wilgard massait son cou douloureux.

- Je cherchais des herbes médicinales, pourquoi ? répondit-il avec sa voix arrogante. Vous voulez débattre de l'efficacité de ma médecine par rapport à celle de vos prières qui n'ont jamais réussit à éloigner cette abomination ?

- Ou est Krager ?

- Partit chassez le démon, maugréa-t-il. Je ne lui donne pas plus d'une heure avant de tomber sur elle et de se faire mettre en pièce. Vous feriez mieux de prier pour le salut de son âme, s'il en avait une.

- Que voulez-vous dire ? releva tout de suite le prêtre.

- A votre avis ? cracha Wilgard. Vous êtes vous jamais demandé pourquoi cette horreur s'en prenait à nous ?

- Un démon qui a sa tanière proche d'un village tel que le notre vient chasser. C'est dans l'ordre des choses mon jeune ami, ajouta Edicius d'une voix douce, se rendant compte que ce jeune imbécile savait quelque chose qu'il ignorait.

- Dans l'ordre des choses ! s'exclama Wilgard. Bien sûr ! Un démon qui apparaît du jour au lendemain et commence à massacrer à tout va, ici et nulle part ailleurs, vous trouvez çà normal vous ?

- Vous perdez de votre objectivité jeune homme, répondit le prêtre. Quoique vous ayez vu dans cette forêt...

- Arrêtez avec vos conneries ! hurla-t-il. Depuis combien de temps savez-vous, hein ? Depuis combien de temps savez-vous que cette créature fait tout çà par pure vengeance ?

Il commençait à perdre patience, et sa colère envers Edicius s'enflammait tout d'un coup. Il arriva au prix d'un effort démesuré à reprendre emprise sur lui-même, et à se calmer. Il en avait trop dit, il s'en rendait compte maintenant. Il allait devoir jouer serré s'il ne voulait pas éveiller les soupçons.

Le prêtre comprit qu'il n'en tirerait plus rien, du moins pour l'instant. Il se dirigea vers la porte, et, se retournant sur le seuil jeta un dernier regard au jeune médecin. Il devrait le surveiller s'il ne voulait pas qu'il fasse des bêtises, surtout avec la furie qu'il avait ramené du monastère des rogues.
La nuit tombait sur Dagorlad. Blood Raven faisait le tour des fortifications improvisées, défense dérisoire contre une horde de démons, mais pouvant ralentir une créature isolée, donnant le temps de la cribler de flèches. La journée avait été longue, entre la construction des défenses et le briefing des derniers soldats valides du village. Même d'après les rares témoignages qu'elle avait pu recueillir avec les autres Soeurs, elle ne parvenait toujours pas à déterminer l'espèce de ce démon. Pourtant elle en avait suffisamment côtoyé dans les catacombes de Tristram. Une voix interrompit sa réflexion.

- Soeur Raven, il me semble qu'une silhouette s'approche d'ici.

C'était la plus jeune, tout juste dix-sept ans, des dix combattantes qui avaient été désignées pour l'accompagner. A peine un mètre soixante-dix, elle était pourtant très belle avec sa longue chevelure brune, ses yeux d'un bleu intense et son corps aux formes généreuses. Blood Raven l'observait souvent à la dérobée et était fascinée par son innocence et nourrissait à son encontre des pensées délicieuses mais inavouables.

A ces mots, elle s'était immédiatement mise en état d'alerte, tous les sens en éveil. Son regard perçant balayant la plaine qui s'étendait sur deux kilomètres avant l'orée du Bois Obscur. Elle repéra à la limite de son champ de vision une ombre qui se rapprochait doucement du village.

- Tu as une bonne vue Soeur Naween, la complimenta-t-elle. Préviens vite les autres !

- A vos ordres, clama-t-elle, toute excitée du compliment qu'elle venait de recevoir de La Blood Raven, la survivante de Tristram, cette femme qu'elle admirait parmi toutes.

Elle se dirigea alors vers les quartiers réservés aux rogues à leur arrivée. Il fallut moins d'une minute pour que toutes soient à leurs postes respectifs. Edicius arriva quelques minutes plus tard, avec son glaive, ayant passé une armure de cuir légère. Il s'adressa directement à Blood Raven.

- Vous l'avez repéré ?

- Quelqu'un ou quelque chose s'approche, répondit-elle. A cette distance je ne suis pas sûre.

Elle préparait déjà son arc. Elle pouvait abattre une cible mouvante à plus de 150 mètres avec cet arc gothique, vieux de plusieurs siècles et découvert au hasard des souterrains sous la cathédrale de Tristram. Elle se concentra sur sa vision intérieure, essayant de percevoir l'énergie vitale de l'ombre qui se rapprochait toujours. Ce qu'elle ressentit la laissa perplexe, l'énergie vitale était très faible, presque insuffisante pour faire battre un coeur, et pourtant cette ombre avançait toujours. Elle focalisa son esprit sur l'ombre, encocha une flèche et banda son arc au maximum.

- On dirait un homme, murmura la jeune Naween. Il avance doucement et il semble tituber...

Blood Raven, gardant son projectile prêt, se concentra un peu plus sur cette ombre. Elle du remarquer que la jeune rogue avait raison. Elle avait décidément bien des qualités cette gamine, pensa-t-elle. Il faudrait vraiment qu'elle s'occupe d'elle toute cette histoire terminée. L'ombre avançait toujours vers la barricade et ce ne fût que lorsqu'elle se trouva à moins de 50 mètres qu'un villageois s'étrangla d'horreur et cria :

- C'est Krager !

Tous se figèrent à cet instant et regardèrent le chef des miliciens arriver, marchant péniblement, comme un somnambule. Des hommes quittèrent leur postes et, sautant la barricade coururent vers lui, ignorant les ordres de Blood Raven leur intimant de rester à leur postes. Ce qu'ils virent les glaça d'horreur : il avait été écorché vif, ses paupières étaient cousues, de même que ses lèvres. Des crochets étaient plantés dans ses tympans... Malgré ces monstrueuses mutilations, il marchait encore, suivant le chemin menant au village.

Surmontant leur dégoût, certains le soulevèrent et le portèrent à l'abri des barricades. On fît appeler Wilgard qui, une fois arrivé et ayant contemplé le corps torturé, ne pu retenir son dîner et vomit d'horreur. Une fois qu'il se fut remit de ses émotions, il se dirigea vers le moribond et déclara d'une voix blanche :

- Je ne peux rien faire pour lui. Il mourra dans quelques heures tout au plus, c'est déjà un miracle qu'il ait pu revenir au village.

- Vous devez faire quelque chose Wilgard, lui intima Edicius qui maîtrisait avec peine ses entrailles en folie. C'est votre devoir de médecin qui vous l'ordonne, et si ce n'est pas lui alors écoutez votre coeur.

- Le dernier service à lui rendre est de mettre fin à ses souffrances, répondit le jeune médecin.

- Allons Wilgard, tu ne vas pas le laisser mourir sans rien tenter, lui dit Marius qui s'était approché du corps et avait commencé à lui rendre un semblant de dignité, le couvrant avec une cape.

Pourtant Wilgard n'avait aucune envie de s'occuper de lui. Son dégoût pour ce tortionnaire s'intensifiait à chaque instant, car c'était bien un tortionnaire qui gisait là mourrant, un immonde tortionnaire qui avait payé pour ses crimes passés, et Dieu sait qu'ils étaient nombreux. De plus, il devinait maintenant que toute cette sombre histoire était venue de lui, tous ces morts innocents, toute cette souffrance, cette horreur. Il arrêta sa décision, cracha sur Krager et fît demi-tour, se retrouvant face à Blood Raven qui avait abaissé légèrement son arc et le fixait avec ses yeux dorés.

- Si vous voulez l'aider, ma chère petite rouquine, il est à vous, persifla-t-il. Quoique je doute que vous puissiez en tirer grand chose, non que je ne reconnaisse en vous un certain talent en la matière.

Elle le fixait avec un regard où se mêlait haine et dégoût. Il se tenait toujours devant elle, la provoquant avec ce petit sourire narquois au coin des lèvres, l'évaluant de la tête aux pieds comme il l'aurait fait d'une vulgaire marchandise. Soudain, une pulsion de rage déferla en elle et, s'approchant de lui, elle lui décocha un violent coup de genoux à l'aine qui le plia en deux et mit fin à son sourire. Le coup de pied suivant partit à la vitesse de l'éclair et vint le frapper au visage, le projetant dans les airs et l'envoyant s'écraser lourdement à deux mètres de là, se tortillant péniblement et gémissant de douleur.

Se retournant brutalement vers le corps agonisant de Krager elle arma son arc et tira. La flèche se planta dans le front du moribond avec un bruit sec, mettant fin à ses souffrances. Elle encocha rapidement une autre flèche et visa le médecin qui se tordait toujours de douleur sur le sol. Mais cette fois, Edicius fût le plus rapide et s'interposa, glaive au clair et bouclier en position, prêt à tout.

- Hors de mon chemin vieux croulant, gronda-t-elle en affermissant sa prise sur son arc bandé au maximum.

- Vous ne lui ferez rien, répondit-il.

- Je vais le tuer et vous aussi si vous restez sur mon chemin, dit-elle, reconsidérant sa cible.

Voyant que les choses allaient tourner au carnage, le doyen chercha du regard les autres rogues. Il croisa celui de la jeune Naween qui inclina la tête imperceptiblement et s'approcha de Blood Raven et lui du prêtre.

- Ma soeur, calmez-vous je vous en prie, dit-elle d'une voix mal assurée. C'est peut-être une diversion de la Corrompue.

- Et alors ? Où est le problème ? cracha Blood Raven. Tu veux peut-être insinuer que je ne sais pas commander, petite salope ?

Ses mots figèrent Naween. La colère de son capitaine était en train de se tourner vers elle, et elle ne voyait plus comment se sortir de ce pétrin. C'est alors qu'un reflet lumineux lui frappa l'oeil. Elle se tourna rapidement et aperçu dans l'ombre d'un bâtiment une femme qui venait d'égorger une des rogues avec une dague effilée. Elle lui maintenait la tête en arrière d'une main, faisant jaillir le plus de sang possible de la blessure ouverte, tandis que l'autre réduisait au maximum les convulsions frénétiques de sa victime agonisante. Elle ne marqua qu'un court temps d'arrêt, releva son arc et tira un projectile magique qui fondit sur sa proie.

Alertée par la lumière filant vers elle, la femme se servit du corps mourrant comme bouclier et recula tout en se saisissant d'un shuriken, qu'elle n'eût pas le temps de lancer car Blood Raven ayant suivit le regard de sa jeune subordonnée, venait de tirer un trait mortel sur sa nouvelle cible. Se jetant sur le côté, elle esquiva le projectile sans difficulté et lança son shuriken qui siffla dans l'air avant de venir se planter dans la gorge d'une des rogues, perchée sur un toit et qui n'avait pas réagit assez vite.

Se sachant repérée, elle s'enfuit vers la sortie du village, en zigzaguant à une vitesse impressionnante sous le tire nourrit des rogues. Arrivée à la barricade, elle se retourna et jeta de part et d'autre de la voie principale des fioles explosives qui firent voler en éclat deux chaumières, déclenchant un début d'incendie. Ravie de sa diversion, elle sauta la barricade et courut vers le Bois Obscur. Elle ne vit pas une rogue aux cheveux flamboyants qui avait grimpé sur un toit la prenant pour cible. Elle ressentit le danger trop tard et une flèche acérée vit lui transpercer le côté gauche, la jetant au sol.

Se relevant avec peine, elle fixa la responsable qui avait baissé arme et grava ses traits dans sa mémoire. « Une si jolie femelle, pensa-t-elle, je vais lui réserver un sort tout particulier, ainsi qu'à cette petite garce qui m'a interrompu. Ma vengeance n'épargnera personne. »

Perchée sur son observatoire, Blood Raven fixa celle que l'on nommait la Corrompue et se jura de la massacrer à petit feu pour ce qu'elle venait de faire. Et quand j'en aurais fini avec toi je répandrais tes restes aux quatre coins du monde et je piègerais ton âme pour que tu connaisses le martyr pour l'éternité. »
En redescendant de son perchoir, Blood Raven fût interpellée par Edicius. Il semblait dans un état épouvantable, non que la mort de plus de trois personnes en quelques secondes ne l'ai pas choqué, mais surtout du fait que cette fois la Corrompue avait attaqué directement et sans détours le coeur même du village.

- Vous l'avez eu ? demanda-t-il immédiatement, avec une lueur d'espoir mêlée de sauvagerie qui sembla malsaine à la jeune femme.

- Je l'ai touché mais elle n'est pas morte, et elle a prit le temps de me regarder avant de repartir vers le Bois Obscur.

- Je croyais que vous étiez une combattante des plus expérimentée, remarqua le prêtre presque perfidement, je vois que votre réputation est exagérée, comme souvent.

- Ne parlez pas de ce que vous ne connaissez pas, rétorqua Blood Raven avec un soupçon de menace dans la voix.

- Mais justement je m'y connais, répliqua-t-il.

- Au lieu de faire de l'esprit faites plutôt votre devoir pour mes camarades qui sont tombées au combat, cracha-t-elle avant de s'éloigner, au summum de la colère.

Elle regagna le quartier des rogues, où ses soeurs d'armes veillaient les victimes de la nuit. Elle alla se recueillir un moment devant les dépouilles, puis sans un mot, alla s'allonger, essayant de recouvrer son calme. Ne parvenant pas à s'endormir, elle se mit à réfléchir sur cette étrange histoire.

Tout d'abord, un prêtre plutôt singulier vient au monastère demander de l'aide pour tuer un vulgaire démon. Puis, ce dit démon se trouve être en fait une jeune femme des plus redoutables. Peu de personnes semblaient s'en être rendu compte, ou alors ils le cachaient délibérément. Au début elle pensa à une succube, mais finit par rejeter cette idée pour la simple raison qu'une telle créature aurait pu dévaster toute la région en une nuit. Non, c'était bien une simple humaine qui avait « changé ». Elle ne comprenait pas comment cela avait-il pu se produire, mais était de plus en plus perplexe. Elle se jura de mener sa propre enquête dès le lendemain, et après un long moment finit par sombrer dans un sommeil agité.

La Corrompue regardait la flèche qu'elle venait de s'extraire du côté avec une fascination grandissante. On était loin d'un projectile normal, ou du moins normalement rencontré dans les rangs des Soeurs de l'oeil Aveugle. La pointe avait été crantée avec précision afin d'infliger une plus grande douleur à la cible, ce qui avait remarquablement fonctionné sur elle, lui arrachant des hurlements bestiaux pendant l'extraction. Comme la douleur lui procurait un certain plaisir physique, le seul d'ailleurs, elle en vint à remercier cette rogue de l'avoir touché sans toutefois oublier de lui promettre une mort lente et douloureuse.

Après avoir lavé sa plaie ensanglantée du mieux qu'elle pu, elle se dirigea vers sa tanière. Sa « tanière » était en fait un vieille maison tombant en ruines dans laquelle elle avait vécu bien des années auparavant. C'était le seul endroit où elle se sentait chez elle, et elle s'était efforcée de la garder en bon état. Quand elle entra dans la pièce principale, son attention fût attirée par un bruit de chaînes. Elle remarqua avec satisfaction que sa dernière proie, une jeune fille d'une douzaine d'années, était toujours vivante et qu'elle était encore en train d'essayer de s'enfuir et qui, la voyant s'approcher, se tassa sur elle-même et commença à sangloter.

- Tu veux toujours t'enfuir n'est-ce-pas ? La Corrompue avait une voix mielleuse, et, lui caressant son visage couvert d'ecchymoses et de larmes, reprit : pourquoi veux-tu fuir ? Pour retrouver qui ? J'ai massacré toute ta famille tu te souviens ? Il n'y a plus personne qui t'attend, et tu est bien naïve si tu crois que quelqu'un te recueillera... Oui, il n'y a personne qui puisse te venir en aide, tu n'es plus rien d'autre qu'une chose, ma chose, et si tu es gentille tu vivras un peu plus longtemps.

Elle avait capturé cette gamine quelques jours auparavant lors d'une sortie nocturne, alors qu'elle se trouvait avec un jeune homme du village qu'elle avait égorgé avant de la traîner chez elle et de massacrer toute sa famille devant elle. Ceux-là avaient participé à son calvaire bien des années plus tôt et avaient eu le temps d'implorer son pardon avant de rendre leur dernier soupir. Puis, par caprice plus qu'autre chose elle l'avait gardé en vie, tout en la torturant de temps à autre pour se distraire, bien que ses seuls pleurs suffisent à lui procurer une intense satisfaction, celle de la vengeance accomplie.

Elle se saisit des cheveux de la pauvre petite chose sanglotante et approcha son visage du sien et entreprit de lui lécher ses larmes. Puis elle l'embrassa avec violence tout en lui lacérant le ventre avec les ongles effilés de sa main libre. Des gémissements étouffés jaillirent et le corps de la malheureuse fut secoué de spasmes. Son bourreau entreprit après de se nourrir du sang qui perlait des récentes blessures et pencha sa tête vers le ventre de sa victime. Pendant que sa langue fouillait lentement les plaies, la Corrompue s'émerveilla une nouvelle fois sur ce corps innocent aux formes prometteuses et se jura de ne pas la tuer trop vite.

Elle se releva et se mit à arpenter la pièce sans plus prêter attention à la pauvre enfant blottie sur le sol qui pleurait bruyamment. Elle finit par s'asseoir à l'unique table de la maison et fît l'inventaire de ses armes. Il ne lui restait plus que deux fioles explosives qu'elle réservait pour la chapelle, cinq poignards de lancé qu'elle devrait utiliser avec parcimonie, ainsi que deux shurikens empoisonnés. La chasse touchait à sa fin et il lui faudrait bientôt utiliser les grands moyens pour purifier cette terre maudite.

Elle alla s'allonger sur un lit, qui n'en avait que le nom, et, bercée par les gémissements de sa victime, elle repensa à sa longue errance qui l'avait ramener à Dagorlad après bien des années, comment la haine et la vengeance l'avaient dévorer, la transformant de plus en plus en cette femme au teint blafard et au corps froid comme la glace qui ne prenait de plaisir que dans la douleur et la destruction.

Elle se revit lorsqu'elle n'était qu'une jeune fille innocente et, pour la première fois depuis plus de huit ans, des larmes lui montèrent aux yeux tandis que la tristesse et le remords remontaient à la surface dans une vague incontrôlable. Les reniflements se changèrent bientôt en sanglots qui eux-mêmes se transformèrent en hurlements déchirants de bête à l'agonie, tandis que les visages de ses bourreaux revenaient danser devant ses yeux et qu'elle se tordait de douleur sur sa couche. Puis, après une demi-heure de lamentations insoutenables elle parvint à reprendre emprise sur elle-même, se redressa et s'assit la tête dans ses mains. Quand elle se leva et alla chercher de quoi se restaurer un peu, le regard qu'elle jeta au passage à son jouet humain suffit à la faire se tasser contre le mur tandis qu'elle se protégeait déjà de ses petits bras tremblants.

Elle se nourrit frugalement, restant debout, et chercha du regard son fouet à multiples lanières en cuir et alla s'en saisir avant de se diriger vers la forme tremblante au pied du mur. Elle avait pleuré pour la dernière fois les dernières larmes de son corps. Ses doutes avaient disparu avec le peu de pitié et d'humanité qui demeuraient encore en elle. Elle allait accomplir sa vengeance impie sur ce village démoniaque et rien ne pourrait l'arrêter, pas même cette femme à la chevelure de feu...
Ce matin-là, la jeune Naween s'éveilla plus tôt qu'à l'accoutumé. La nuit précédente avait été une véritable épreuve pour ses nerfs et elle en éprouvait encore une profonde lassitude. La vision du carnage parmi ses soeurs flottait dans son esprit et lui rappelait la dure réalité du combat. Elle sortit discrètement de la cabane où dormaient encore ses consoeurs et se dégourdit les jambes dans la fraîcheur matinale. Ses foulées légères la menèrent au cimetière du village. Sans trop savoir pourquoi elle se trouvait dans ce lieu, elle commença à errer entre les tombes. Elle avait l'impression qu'une voix la guidait, lui montrait le chemin, et elle le suivait sans chercher à savoir où elle allait se retrouver.

Elle finit par arriver devant un caveau massif, plus ornementé que ses semblables, et beaucoup plus impressionnant que les misérables sépultures qui peuplaient le cimetière. Sa main se porta d'elle-même à la lourde poignée de la porte, et cette dernière s'ouvrit facilement, trop d'ailleurs. Sa conscience lui hurlait de s'éloigner au plus vite de cet endroit, et pourtant elle suivait ce murmure. Elle pénétra dans le caveau à tâtons, chercha les parois de sa main et attendit un moment que ses yeux s'habituent à l'obscurité.

Elle devina un cercueil massif en obsidienne, contrastant étrangement avec la pauvreté des tombes extérieures. Elle se dit qu'elle avait sûrement devant elle le sépulcre de quelque riche personne, pourtant elle n'y croyait guère, et à mesure que le temps passait elle en était de moins en moins persuadée. Les bas reliefs sur le cercueil étaient relativement étranges, totalement inconnus pour elle, et lui inspiraient une certaine appréhension. Elle ne devait pas avoir le temps de poursuivre ses investigations, et bien que son ouïe fût très fine, elle ne sentit pas venir le coup qui l'assomma net.

Une douleur atroce l'éveilla brutalement, comme si on l'écartelait, et elle ne mis pas longtemps à comprendre qu'elle était enchaînée à un chevalet. Des ombres se mouvaient dans la demi-obscurité de la pièce et elle cru reconnaître une présence familière, ce qui se révéla être une certitude lorsqu'une voix jeune et narquoise s'adressa à elle.

- Alors poupée on se décide enfin à revenir parmi les vivants ?

La voix du jeune Wilgard charriait des pics de glaces et malgré toute sa volonté, la jeune rogue ne put s'empêcher de trembler en le regardant s'approcher d'elle.

- Tu as bien raison d'avoir peur, railla-t-il comme les tremblements de la jeune fille ne lui avaient pas échappé, car bientôt tu ne connaîtras plus la peur, ni rien d'autre d'ailleurs.

- Vous allez me tuer ? parvint-elle à demander après avoir péniblement déglutit.

- Non, répondit-il aussitôt, enfin cela dépendra de tes résistances physique et mentale.

Puis s'adressant aux autres ombres qui se tenaient en retrait :

- Commencez le rituel immédiatement, aboya-t-il, mais ne vous avisez pas de vous tromper dans tous vos salamalecs, je ne suis pas d'humeur à voir mes efforts anéantis par l'incompétence d'une bande de mécréants.

- Nous n'aimons pas votre ton, chuinta une voix étouffée, pas plus que votre attitude. Sachez que vous n'avez ni la force de caractère et encore moins l'intelligence de votre aïeul, alors soyez très prudent lorsque notre destin sera accompli.

Wilgard parut un instant soucieux, puis il haussa les épaules et s'éloigna du chevalet en reniflant dédaigneusement.

- Qu'allez vous me faire ? demanda la jeune Naween d'une voix où la panique commençait à percer.

- Nous allons nous servir de votre jolie carcasse comme d'un réceptacle pour une entité plus « utile » dirons-nous, lui répondit Wilgard avec un sourire de sadique. Si je peux vous donner un conseil, ne luttez pas, non seulement vous souffririez inutilement, mais il ne fait aucun doute que rien ne peut vous venir en aide maintenant et que vous n'êtes pas assez forte pour résister.

- Cessez immédiatement ! aboya la voix chuintante. Laissez nous officier et fermez votre clapet ou je vous le fermerai moi-même.

La menace toucha, car le sourire de Wilgard s'étrangla dans sa gorge et il resta planté sans pouvoir répliquer.

Alors que les ombres se positionnaient sur les cinq extrémités d'un pentagramme, la jeune Naween fut prise d'une atroce terreur et commença à se débattre violemment ce qui ne contribua qu'à la faire souffrir un peu plus, les chaînes étant solides. Elle entendit comme dans un cauchemar le commencement des litanies qui devaient conjurer un esprit dont elle ignorait tout.

Elle ne savait qu'une chose : elle ne s'en sortirait pas. On lui avait enseigné l'existence de ces rituels et elle commençait à se remémorer tous les détails sordides que sa Soeur aînée y avait associés. Incapable de faire autre chose que trembler et gémir, elle supplia Wilgard.

- Pitié ! hurla-t-elle d'une voix hystérique. Tuez-moi plutôt mais ne me faites pas çà !

- Les dés sont jetés ma petite, répondit-il de sa voix redevenue moqueuse. Voyons combien de temps vous résisterez à vos bourreaux.

La mélopée s'enfla tout doucement, et ce qui était au départ qu'un subtil murmure dans sa tête devint vite une clameur intolérable. Une voix hurlait des paroles indistinctes dans une langue tout aussi inconnue de la jeune rogue. Elle se tordait sur son chevalet, comme pour échapper à cette voix, mais rien n'y faisait. Puis, alors que les incantations montaient à l'unisson dans la petite pièce de plus en plus haut, une impression de malaise physique se glissa en elle. Quelque chose se glissait en elle contre sa volonté, un courant tantôt brûlant comme un fer rouge, et tantôt aussi glacial que la glace la plus froide. Son corps fut pris de convulsions alors qu'elle hurlait d'une douleur inhumaine, sa voix d'enfant, déformée par une implacable torture, devenue stridente à briser le cristal.

Seule restait la souffrance atroce de se faire ravager le corps aussi bien que l'âme et cette voix toujours plus forte qui lui martelait le crâne plus fort que ne l'aurait fait une masse d'arme. Cela dura une éternité, puis brutalement, après un paroxysme d'horreur et de torture, tout éclata dans sa tête et il ne resta plus rien de la souffrance. Elle avait pris conscience de quelque chose de bien plus important, elle avait maintenant un destin à accomplir.

Elle se sentit soudain gênée par ces misérables entraves qui la retenaient, et s'en débarrassa comme on chasse un insecte. Regardant autour d'elle, elle reconnut Wilgard et s'avança vers lui. Arrivé à sa hauteur, elle lui demanda d'une voix qui n'était plus celle de l'enfant, mais celle, glacée, d'une créature innommable :

- Quels sont vos ordres pour que notre destin s'accomplisse ?
Le matin était plus frais que d'habitude et c'est l'impression d'un danger imminent qui éveilla Blood Raven. Se redressant rapidement elle empoigna son couteau, qui ne la quittait jamais, et scruta la pièce où elle se trouvait. Tout semblait normal, pourtant une sensation de malaise la taraudait. Elle remarqua qu'elle était seule dans la pièce, tous les lits de ses consoeurs étant vides. Elle se leva et s'habilla rapidement, vérifiant sa multitude d'armes et son arc qui faisait sa fierté et sa réputation au sein des rogues.

Elle avait dormi d'un sommeil agité, peuplé de cauchemars. Ils revenaient de plus en plus souvent depuis son retour de Tristram, et elle avait perdu le compte des nuits où elle s'éveillait en hurlant de terreur. Pourtant cette fois c'était différent, elle avait perçu la présence d'une entité très proche. Elle avait perçu une voix, comme un murmure, qui lui chuchotait des choses indistinctes mais elle avait eu beau y prêter attention elle n'avait pas pu comprendre un traître mot.

La sensation de danger se fit brutalement sentir à nouveau, piqûres d'aiguilles dans le cou, et elle encocha rapidement une flèche et pointa la porte d'entrée, qui s'ouvrit sur la jeune Naween quelques secondes plus tard. Remarquant l'arc pointé dans sa direction elle se figea et resta immobile avec une drôle d'expression sur le visage.

- On ne t'a pas appris à frapper ?! J'ai failli te clouer au montant de la porte, cracha Blood Raven, abaissant son arc et se détendant brutalement.

- Je ne voulais pas vous déranger, Capitaine, s'excusa Naween avec un pâle sourire sur ses jolies lèvres.

- Que veux-tu ? Répondit elle, son instinct lui hurlant de quitter cet endroit au plus vite.

- Je suis venue prendre de vos nouvelles Capitaine, murmura-t-elle d'une voix douce.

- Prendre de mes nouvelles ?

Le danger était toujours très proche pourtant il n'y avait que Naween dans la pièce avec elle.

- Oui toutes les autres soeurs nous ont quitté pendant la nuit et je me demandais comment vous vous portiez Capitaine, dit elle de la même voix douce.

- Je ne suis pas sûr de bien comprendre.

Elle restait sur le qui-vive et la sensation de danger grandissait à mesure que le temps passait.

- Nos soeurs sont mortes pendant la nuit, voilà ce que j'essaie de vous dire Capitaine.

Sa voix avait toujours ce timbre doux et Blood Raven se rendit compte en un instant de l'étendu du danger. Car elle connaissait cette sensation, cette peur qui l'envahissait en cet instant, elle l'avait ressenti dans les catacombes sous la cathédrale de Tristram. Ce danger provenait de la jeune rogue qui se tenait devant elle. Son instinct lui avait sauvé la vie bien des fois dans le passé et elle se fiait à lui inconsciemment. Sans prendre le temps de répondre, elle releva son arc et décocha une flèche en direction de la jeune fille qui se trouvait à quelques mètres d'elle. Le projectile n'atteint jamais sa cible, qui l'avait esquivé promptement en inclinant sa tête sur le côté, presque négligemment.

- Voyons Capitaine, déclara Naween l'air toujours aussi innocent, vous ne devriez pas essayé de me tuer. Que penserait notre Grande Prêtresse si elle vous voyait attaquer l'une de vos soeurs.

Ce faisant elle s'avança vers son capitaine d'un pas léger, ses hanches ondulant de très belle manière. La peur gagnait Blood Raven, elle ne pouvait détacher ses yeux de ceux de sa soeur.

Brutalement, des flashs de mémoires lui revinrent sur son calvaire dans les catacombes, sa souffrance et son humiliation. Se ramassant, elle se jeta brutalement sur son adversaire en hurlant comme une damnée, sa façon de chasser la terreur qui lui tordait l'estomac.

Surprise devant cet assaut désespéré, la jeune Naween marqua un temps d'arrêt et reçu de plein fouet le plaquage de son capitaine qui la projeta brutalement contre un mur trois mètres plus loin. Profitant de l'occasion Blood Raven courut vers la porte d'entrée et sortit en trombe de la petite maison pour se figer devant ce qui l'attendait au-dehors : ses soeurs braquant leurs armes sur elle.

- Que signifie ceci ? Demanda-t-elle à la cantonade.

Il n'y eut pas de réponse. Elle comprit vite pourquoi en remarquant le regard vide de celle qui avait été ses soeurs d'armes. Elles avaient été hypnotisées et, bien que conservant toute leurs capacités, elles n'étaient plus que des objets utiles et obéissants à qui les contrôlait.

- Cela veux juste dire que vous êtes relevé de vos fonctions de capitaine, prononça une voix douce derrière elle.

Sortant à son tour, Naween, qui semblait indemne, se rapprochait d'elle par derrière. Sentant qu'elle n'aurait plus d'autre occasion de s'en sortir Blood Raven utilisa le dernier atout qu'elle possédait encore, un aspect magique de son arc qu'elle avait gardé secret de toutes et de tous, même de sa meilleure amie Kashya à qui elle avait pourtant l'habitude de se confier. Redressant son arc elle décocha une flèche qui se divisa en six tirs distincts, qui allèrent tuer chacun leur cibles, trop rapprochées les unes des autres.
Se jetant au sol en opérant une roulade très habile elle esquiva une volée de flèches et lâcha une seconde salve qui sema la mort dans les rangs adverses. Surprises par cet imprévu, les rogues traîtresses cherchèrent en priorité à se mettre à couvert, ce qui laissa à leur proie le temps de s'élancer aussi vite que ses jambes le lui permettaient et de mettre une bonne distance entre elles.

Pourtant, la jeune Naween ne s'était pas mise à l'abri et, ayant bandé son arc, tira un projectile enflammé qui atteint son capitaine, lui perforant la cuisse droite, la jetant à terre hurlant de douleur. A ce spectacle elle ne pu retenir un sourire et s'approcha lentement, laissant le temps à sa victime de goûter à la terreur d'une bête blessée et traquée.

Mais pour autant, Blood Raven n'avait pas perdu sa combativité et, se redressant au prix d'un effort surhumain, tira une nouvelle salve de multiples projectiles en direction de sa poursuivante qui, cette fois encore, esquiva sans difficulté apparente. Elle avait toujours son si joli sourire aux lèvres et Blood Raven ne pu s'empêcher de la trouver très désirable en cet instant.

Souriant à son tour elle utilisa une des fioles explosives qu'elle portait et la projeta vers sa Némésis tout en faisant demi tour, et s'élança vers la sortie du village sans prêter attention à la douleur qui lui lançait dans la jambe à chacun de ses pas. L'explosion, bien que de faible puissance, suffit à produire suffisamment de fumée pour la masquer à ses poursuivantes, et elle savait qu'elle n'avait rien à craindre d'elles, car elles possédaient toutes des arcs de moyenne portée, n'ayant pas la force physique d'en manier un de la taille du sien.

Se dirigeant vers le Bois Obscur, elle se dit qu'elle commettait une folie. Jamais elle ne pourrait le traverser dans son état et poursuivie de surcroît. Il fallait qu'elle prévienne le monastère aussi vite que possible de cette trahison. Elle continua à s'enfoncer dans les profondeurs de la forêt en boitant. Le seul avantage à sa condition était que la flèche l'ayant touché était enflammée il n'y avait pas de sang et donc pas de traces, ce qui ralentirait les recherches.

Au bout de quelques heures elle sentit ses forces l'abandonner et ses jambes finirent par la trahir. Elle s'affaissa lourdement contre un arbre et sombra lentement dans le néant. Elle eut le temps de penser à l'ironie de sa situation, elle qui avait survécu aux abominations de Tristram allait mourir au fond d'un bois, trahie par cette jeune rogue au sourire innocent et aux yeux d'un bleu si profond qu'il vous donne le vertige, trahie par les villageois qu'elle était venue défendre au péril de sa vie, trahie son ordre qui l'avait envoyé à la mort et trahie une nouvelle fois par ses faiblesses de mortelle.
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