Fanfiction Diablo II

- Comment peux-tu être sûr que c'est bien cette nuit ?

- Je le sens en moi, et regarde : l'astre de la nuit est rouge.

- Tu la vois rouge, toi, la lune ?

- Oui.

Décidément, songe-t-il, de nombreux signes restent hors de la vue du jeune homme. Il faudrait lui apprendre, mais ce ne devrait pas être si difficile, je le sens. des Forces veillent sur lui, c'est certain, mais sont-elles toutes bienveillantes ?

Chemin faisant, l'autre observe son compagnon : le visage d'un blanc livide, maigre, osseux, les cheveux assortis au reste : blancs comme ceux d'une personne âgée. Pourtant, l'homme n'est pas vieux : son regard pétille d'intelligence et de fougue. Il semble avoir pris ces marques profondes en étant confronté à des horreurs indescriptibles, des puissances terribles.

Il s'agit peut-être de quelque chose d'approchant, se dit-il, car il sait que l'art de la nécromancie fait approcher de très près des forces démoniaques qui peuvent en rendre certains fous furieux, alors qu'ils tentaient de maîtriser une sombre magie.

Alors que la nuit est déjà fort avancée, ils arrivent à la lisière d'une forêt épaisse de feuillu, et s'enfoncent sous le couvert des arbres. Aucun chemin n'est là pour les guider, mais le nécromancien sait par où passer, comme tiré par un fil invisible. Ils marchent ainsi pendant de longues heures, en silence.

- On approche.

Son compagnon hoche la tête sans rien dire et se raidit soudain ? Un squelette vient d'apparaître ; il fonce droit sur eux, une épée à la main.
Le jeune homme tire immédiatement la sienne de son fourreau, mais l'autre lui pose la main sur l'avant-bras.

- Attends, lui murmure-t-il, fixant le squelette dans ses orbites vides.

Celui-ci fait encore quelques pas et s'arrête à trois mètres de distance, comme retenu par une laisse. Un tremblement le secoue comme il essaie de continuer, dévisageant le nécromancien. Puis, il se disloque et s'effondre par terre en un tas d'os.

Son adversaire s'agenouille pour examiner les restes, alors que le garçon se baisse pour ramasser l'épée qui s'évanouit en fumée dès qu'il l'a effleurée.

- Le travail est remarquable, ce sont de beaux ossements.

Beaux ? En effet, les os sont d'un blanc immaculé, il n'y a pas une trace de chair. Sur le front, ils distinguent maintenant un signe alchimique formé de deux traits, un courbe et un droit, et d'un point.

Le nécromancien se relève et avance dans la direction d'où est venue la créature :

- Egnäs, montre-toi, et dis à tes squelettes de ne pas chercher à m'approcher.

- Ils le savent déjà.

La voix vient de leur gauche, où s'avance un homme tellement décharné qu'on pourrait le confondre avec les trois squelettes armés qui l'entourent.

- Ils sont liés à moi, et je ne ferais pas de mal à un vieil ami.

- Tu n'as pas changé, malgré les années.

- Extérieurement, peut-être...En tout cas toi tu as changé, Denulk, tu as grandi en puissance.

- J'ai beaucoup voyagé.

- Qui est ton compagnon ?

Denulk se tourne vers le jeune homme, qui s'avance :

- Mon nom est Llámfagar. Je viens du Pays Plat, à l'ouest.

- Je me souviendrai de ce nom, promet Egnäs.

- Je l'ai rencontré alors que sa maison venait d'être détruite par des créatures damnées. Je l'ai vu les combattre, il est doué. Et j'ai accepté qu'il m'accompagne.

- Avant, tu ne te serais jamais embarrassé d'un compagnon.

- Le monde change, rien n'est plus comme avant.

- Oui. Mais attendons d'être au rendez-vous pour en parler. Ce n'est plus loin.

- Certains sont déjà arrivés ?

- Ils sont tous présents.

- Bien. Allons-y.

Ils arrivent à une petite clairière où se trouve un porche d'un autre âge ; le passage qu'il ouvre semble mener à des profondeurs abyssales. La seule lumière est celle qui émane des deux torches fixées sur la pierre, mais leurs flammes ont un aspect bleuâtre et ne dégagent aucune chaleur.

- Tu n'as qu'à m'attendre ici, dit Denulk en s'adressant au jeune homme.

- J'allais te le proposer.

- Tu devrais en profiter pour te reposer et dormir un peu.

- La nuit des bêtes rôdent, il vaut mieux garder les yeux ouverts.

Ici tu es en sûreté, il n'y a pas de danger. D'ailleurs...

Le nécromancien détend alors les bras de sa petite arbalète noire. Petite, mais pas moins puissante, comme l'est le poison que porte chacun de ses carreaux.

- Mais ne t'éloigne pas trop quand même...

Et il s'enfonce dans le souterrain.

Ploc. Ploc.

L'eau qui goutte du plafond tombe au sol en un son qui résonne le long des parois, tandis que les deux hommes avancent dans les ténèbres. Après une longue descente et la traversée d'un dédale de couloirs ornés de symboles anciens et de runes, les deux magiciens sombres arrivent dans une vaste crypte où se tient l'assemblée des nécromanciens.

Ces hommes, Denulk les connaît bien. Ils ont des caractères très différents, comme cela se reflète sur leur équipement : l'un, par exemple, est uniquement vêtu d'un pagne sur son corps squelettique, et armé d'une seule baguette en bois -de l'if très probablement-, alors qu'un autre impose sa présence par son armure d'argent, magnifiquement ciselée. D'ailleurs, ce ne sont pas les trophés magiques qui manquent : un autre encore porte un plastron de texture fantômatique, aux bords flous, qu'on dirait impalpable au toucher.

Mainenant que tous sont présents, il est temps de démarrer :

- La paix relative que nous avons connu depuis la chute du Seigneur de la Terreur à Tristram semble terminée. Tous, nous l'avons remarqué.

C'est l'un des plus âgés qui a pris la parole, bien qu'il soit difficile de donner un âge à chacun des hommes présents. Il s'est levé afin que tous l'entendent ; à sa ceinture pend un kriss à la lame couleur émeraude, ainsi qu'un chapelet de crânes et de visages momiphiés. Un autre reprend :

- Les démons sont de retour, j'en ai trouvé et tué. Ce ne sont que de faibles esclaves pour le moment, mais d'autres viendront.

- On m'a parlé plusieurs fois d'un sinistre Rôdeur qui semble mêlé à cela.

- Oui, je l'ai entendu aussi.

S'il s'agit d'un sorcier qui joue avec les Forces Infernales, il doit être arrêté au plus tôt, car il menace le commun des mortels.

- Les démons pourraient se servir de lui pour investir notre monde.

- Cela ne doit pas arriver, ce serait terrible.

- Il ne s'agit peut-être que d'un homme qui s'est trouvé là au mauvais moment, et dans ce cas le problème vient d'ailleurs. Mais d'où ?

- Il faut découvrir la source de ces troubles au plus tôt. C'est notre principal objectif pour nous tous. Et une fois que nous auront compris comment les Armées démoniaques arrivent sur le plan des mortels, il faudra endiguer ce flot ravageur.

- Il nous faut aussi trouver ce Rôdeur et voir qui il est réellement.

- Voilà ce à quoi nous devons consacrer nos efforts.

Tout semble dit.

La recherche sera longue et fastidieuse, pense Denulk.

- Ah ! autre chose, reprend pourtant l'un des nécromanciens, celui qui porte un pagne : le bruit courre que l'armure de Trang-Oul, notre maître à tous, a été localisée, après avoir été cachée des hommes pendant de nombreux siècles.

Denulk tressaille : la quête des Artefacts anciens, et particulièrement ceux de Trang-Oul, l'un des plus puissants nécromanciens, il en a fait la l'objet de ses errances, toujours à la poursuite d'un indice, d'un manuscrit indiquant l'emplacement d'une relique.

L'Armure ! songe le sorcier, l'Armure de Trang-Oul ! Des écrits relatent qu'elle possède de puissants pouvoirs magiques, qu'elle confère à qui sait s'en servir. A côté d'Elle, tous les objets réunis dans cette crypte, qu'ils soient en or, en argent ou éthérés, valent autant qu'une cuirasse rouillée.

Il prend alors la parole :

- Où se trouverait-elle ?

- C'est un marchand de la cité aux portes du Désert qui m'en a parlé, c'est lui qu'il faut aller voir.

- Bien, j'irai à Lut Gholein trouver ce marchand.

Dehors, l'aube ne va pas tarder à poindre. Llámfagar, éveillé, voit surgir du souterrain une créature constituée de chairs sanguinolentes, qui semble ouvrir la voie à un des nécromanciens, lui-même suivi d'un autre, et encore d'un autre. Ils s'enfoncent dans les bois encore obscurs, dans des directions différents, sans lui parler, et en le voyant à peine.

La réunion doit être terminée, se dit le jeune homme, encore surpris par la vision du golem. Il se met à remballer ses quelques affaires, alors que Denulk sort à son tour :

- Je part pour la cité orientale de Lut Gholein.

- Je peux continuer à t'accompagner ?

- Bien sûr, si tu le désires.

- Si nous allons à Lut Gholein, il nous faut passer par le monastère de la congrégation des Soeurs de l'Oeil Aveugle.

- C'est une étape obligatoire.

- Bien, allons-y.

Et ils s'enfoncent à leur tour dans la forêt, se fondant parmi les ombres créées par les lueurs matinales.

Deux jours plus tard, en quittant la lisière d'un bois, ils tombent sur un petit campement primitif et sont immédiatement assaillis par une horde de petites créatures humanoïdes rouges. Un carreau fend l'air en même temps que l'épée s'abat, et le groupe s'enfuit en piaillant, laissant deux cadavres à terre. Le sorcier a à peine le temps de recharger qu'ils reviennent déjà à la charge. Llámfagar constate alors avec horreur que le démon abattu par le premier trait tiré par Denulk est en train de se relever. Le nécromancien, qui a remarqué la même chose, maudit les monstres qui se jettent à genoux en se frottant les yeux, et abat en deux tirs une créature qui se tenait à l'écart. Bien que de type semblable aux autres, celle-ci est plus grande, cornue, et vêtue de nombreux colliers et bijoux. Une sorte de sorcier, l'auteur de la résurrection. Après cela, les autres passent rapidement sous les fils des lames des deux hommes. La fouille du campement ne donne lieu à rien d'interessant, quelques ossements blanchis et de la ferraille sans importance.

Ils reprennent alors leur route, marchant plus rapidement comme ils se trouvent sur un petit sentier. Chemin faisant, le nécromancien réfélchit à la rencontre qu'ils viennent de faire : ces démons n'ont rien à voir avec les quelques squelettes et zombies rencontrés auparavant. Leur shaman a même été capable de lancer rapidement un sortilège de résurrection, ce qui prouve que des forces maléfiques plus importantes sont maintenant à l'oeuvre. Mais il ne peut s'agir que de restes de la chute de Diablo qui tentent de se ressaisir, menés par quelque lieutenant. Ou alors, mais cela reste peu probable, un Démon Inférieur pense pouvoir investir notre monde, et envoie une avant-garde, mais il ne pourrait pas ouvrir seul un passage suffisant pour lui et son armée. Ces monstres finiront par être balayés.

De toute façon, pour l'instant il suffit de prendre une caravane jusqu'à Lut Gholein, et une fois là-bas, il n'y aura qu'à écouter les informations que détient ce Drognan, qui permettront de resserrer les recherches autour de l'Armure.

Cette quête ne devrait pas s'avérer trop difficile, ni trop longue, conclue-t-il en arrivant en vue d'un camp fortifié, entouré de palissades de bois...