Fanfiction Diablo II

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Le Noël de Bishibosh

Par Bert
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Le Noël de Bishibosh

A l'aube de leur troisième jour de marche, Bishibosh réveilla ses compagnons et leur demanda de faire preuve de la plus grande discrétion afin de ne pas réveiller leurs invités qui dormaient encore. Ils voyageaient très lestement : quelques armes, quelques vêtements... Le reste, provisions, bois, lieu pour dormir, ils se le procuraient dans leur entourage. Hier, la chasse avait été particulièrement bonne et ils avaient longuement festoyé, chanté et s'étaient raconté des contes d'autrefois. De plus, la venue de Bertogale et de Kandorma les avait ravis : ils étaient fiers de la qualité - du moins selon leurs critères gastronomiques- du repas qu'ils leur avaient offert.

Les ordres de Bishibosh furent très bien suivis et il n'y eut pas d'incident, excepté la chute d'une de ces étranges flutes avec lesquelles jouent les Déchus. Une note aigue s'en échappa. Par chance, Bertogale et son compagnon dormaient trop profondément pour être dérangés par un si petit vacarme. Tandis que le maladroit ramassait son instrument, il reçu un coup de canne sur la tête de la part de son maître. Mais hormis cela, Bishibosh était content de ses congénères. Puis, avant de partir, il lui sembla qu'il avait oublié quelque chose et il demanda à ses enfants d'attendre. D'une sacoche, il sortit un cierge, orné de motifs étranges et lança une incantation dont il avait le secret. L'objet lévita dans les airs et Bishibosh lui ordonna :

« Guide nos invités, jusqu'au Paradis et jusqu'en Enfer, s'il le faut ! »

Puis la troupe se mit en marche. De longues heures durant, ils traversèrent le Bois Obscur, évoluant à travers la nature sauvage et sans se soucier de l'absence de sentiers. Bishibosh connaissait son chemin. Les Déchus le suivaient insouciants et bavardaient beaucoup. Un des thèmes les plus récurrents étaient le Grand Conflit. La plupart était enthousiaste à l'idée de lutter à nouveau pour les seigneurs-démons et certains parlaient même de regagner leur gloire passée, lorsqu'ils combattaient dans les légions infernales d'Azmodane. D'autres se perdaient dans des souvenirs moins lointains et repensaient à la défaite de Diablo contre les Horadrims. En une bataille, la guerre, le Grand Conflit, avait pris fin et ils s'étaient retrouvés perdus dans les vastes étendues de ce monde, sans but et sans raison. Ils étaient devenus libres. Quelle étrange sensation.

Finalement, la petite troupe arriva devant une vaste façade, un monument de roches sombres, qui scintillait très faiblement sous les gouttes de la pluie. Bishibosh fit halte, scruta la montagne et aperçu, une dizaine de mètre à sa droite, l'ouverture qu'il cherchait. Il mena les Déchus dans le Passage Souterrain et à peine dévalait-il les marches qui en marquaient l'entrée, que son bâton se mit à briller, éclairant ainsi les parois de la grotte. Les Déchus aimaient beaucoup cet environnement. L'obscurité reposante, le froid doux ; ils appréciaient le vertigineux abîme qui les assiégait de toute part, les plongeant dans une étrange fascination, où rêves et souvenirs se confondaient en une nostalgie perverse. Ils repensaient à leur esclavage, à leurs frères démons restés dans le Monde Souterrain... Cet endroit ressemblait un peu à l'Enfer, au fond.

Bishibosh s'arrêta.

« Nous monterons un camp ici, expliqua-t-il. Ce lieu convient tout à fait à nos besoins. »
La plupart des Déchus acquiescèrent mais certains n'étaient pas encore fatigués et auraient préféré continuer. Aussi, ils se plaignirent :

« Bishibosh ! Nous avons voyagé de nombreux jours et nous approchons de notre but. Pourquoi s'arrêter ?
- Notre Shaman voudrait peut-être profiter de la beauté de ces caves, » ricana l'un.

Mais Bishibosh ne répondit pas.

En vérité, il comprenait ses congénères et il campait ici un peu contre son gré. En effet, la voix, qu'il avait reconnu comme étant celle de Diablo, ne le guidait plus. Il la recherchait à travers les flux d'énergie qui parsemait la grotte et pour cela avait besoin de concentration et de calme. Pendant que ses compagnons allumèrent un foyer, il s'éloigna et trouva la paix dans les ténèbres. Il n'y avait rien à faire, pourtant. La si forte sensation qui le guidait avait disparu ; et sans son maître pour le guider, ce serait folie de s'aventurer dans les labyrinthes du Passage Souterrain. Cela l'embêtait car il ignorait s'il pourrait rebrousser chemin jusqu'au Bois Obscur. Pour le moment donc, ils étaient prisonniers de cet endroit : encore heureux qu'ils s'y accommodaient plutôt bien ! Mais il était inutile d'alarmer ses compagnons. Il resta dans les ténèbres, attendant que les râleurs se calment et feignant une méditation profonde.

Lorsque le feu fut allumé, les Déchus sortirent leurs instruments et jouèrent, individuellement, car ils n'avaient pas leur maître pour les guider. Les conversations recommencèrent. Beaucoup faisaient à présent l'inventaire des provisions, se demandant s'ils pourraient festoyer comme la nuit dernière. Et tandis que ce tumulte se perpétuait, d'étrange lueur firent leur apparition dans les ténèbres lointaines. Progressivement, elles captèrent l'attention des convives qui devinrent silencieux. 'Tiens !' pensa Bishibosh. 'Voilà qui est curieux !' En effet, les lueurs, évoluaient d'une manière tout à fait singulière. Leur rythme était tout à fait irrégulier, elles montaient et descendaient, elles s'arrêtaient, elles repartaient et par-dessus tout, elles se suivaient. Il sembla au Shaman qu'elles firent halte, que celle qui menait les autres sauta et que ses suivantes l'imitèrent. 'Vraiment curieux...' De plus, il ne pouvait pas identifier quelle sorte de magie était à l'oeuvre ; et chose plus troublante, cette magie se rapprochait d'eux.

Bishibosh remettait en question ses pouvoirs : n'arrivait-il plus à discerner la magie ? Ou était-il possible que Diablo se soit tut et qu'à présent, un sortilège différent de tout ce qu'il avait connu errait dans cette grotte ? Non, la coïncidence était trop flagrante... Quelqu'un brouillait ses compétences et se jouait de lui. Plutôt que de se concentrer sur le mystérieux phénomène, il consulta les énergies de son âme à la recherche de la malédiction dont il était la victime. Rien à faire. Il n'avait jamais eu peur, alors il fut tout simplement surpris. 'Vraiment très, très curieux...'

« Arrière ! » cria un Déchu.

Puis sa voix raisonna et quelques secondes plus tard, les lumières firent halte. D'un chant, les Déchus s'écrièrent alors:

« Arrière ! Arrière ! Arrière ! »

Reconnaissant un hémistiche, l'un improvisa :
« Eh ! Ombre de lumière,
Sache qu'ici l'Enfer
A bâtit son foyer.
»

Le chant raisonna longuement dans les vastes corridors souterrains. Les lumières restèrent immobiles et semblèrent même se consulter. Après un temps, on entendit :

« Frères déchus, oyez,
Car vous avez mal vu
Qu'arrivait, imprévue,
Le grand Rakanishu !
»

Bishibosh reconnu son compagnon boucher au premier vers. Il sourit en pensant qu'il s'était arrêté quelque secondes pour composer cette réplique, décidément, les déchus sont de meilleurs poètes que leurs compagnons bleus. De plus, Rakanishu n'était pas grand. Le petit chef donc, vint, suivi d'une demi-douzaine de compagnons, et tandis qu'il s'approchait, on distinguait bientôt, à la place des lueurs volatiles, les torches des démons. Les salutations furent enthousiastes car Rakanishu apportait avec lui une énorme bête, à peu près semblable à une vache, et qu'il y avait de quoi nourrir la petite troupe, certes pas autant que la veille, mais au moins plus que ce qui était prévu pour ce soir. Quelques déchus aidèrent les bouchers pour les préparatifs.

Au menu, il y aurait du bovin de l'enfer !

Bishibosh et Rakanishu se retirèrent pour causer.

« Je suis heureux de te voir, avoua le Boucher.
- Modère ta joie, ami, car notre situation n'est guère meilleure que la vôtre, avoua le Shaman. Nous-mêmes sommes perdus dans le néant du souterrain. Je suppose que tu es venu à l'appel du Seigneur de la Terreur ?
- Oui mais depuis que je suis entré dans cette grotte, je ne l'entends plus... Crois-tu que ce lieu soit maudit ?
- C'est ce que je pensais au début. Pourtant, je me demande à présent si Diablo n'a pas tout simplement arrêté de nous appeler.
- Est-ce possible ? Aurait-il renoncé si rapidement à ses plans ?
- Ou peut-être fut-il lui-même victime d'une malédiction ? Quoi qu'il en soit, sans son aide, nous ne pourrons pas sortir d'ici. Et malgré notre immortalité, nous avons besoin de nous nourrir, et les provisions manqueront rapidement, vu le festin qui se prépare. Et je ne parle même pas de l'ennui.
- Combien de jour tiendrons-nous ?
- Trois jours, peut-être quatre, un mois si nous pratiquons le cannibalisme.
- Ecoute, Bishibosh, il me vient une idée grandiose à l'esprit que l'Enfer m'a donné ! Nous sommes prisonniers dans cette grotte, n'est-ce pas ? Mais en revanche, nos âmes ne sont-elles pas libres ? Et qui sait, combien de temps nous avons avant que le Seigneur de la Terreur se réveille à nouveau et nous appelle à nouveau ? Ce jour, cette nuit, cette soirée, est le requiem de notre liberté ! Cela se fête !
- Je ne peux m'empêcher de penser à ce qui se passerait si Diablo ne nous appelait plus. D'un autre côté, l'idée est séduisante. Festoyons ! »

Ainsi, Rakanishu exposa la situation aux autres Déchus et fit part de son idée, tournant habilement son discours pour qu'il apparaisse comme porteur de bonnes nouvelles, de toute façon, l'euphorie qui s'emparait de tous calmait toutes les craintes, et bientôt, les musiciens s'emparèrent de leurs instruments et jouèrent à nouveau, menés par Bishibosh. Le bovin de l'enfer fut rôti et tous s'agglutinèrent près du feu avec beaucoup d'enthousiasme. Un des déchus demanda d'où provenait cette viande si bonne, et Rakanishu décida de conter le récit de sa chasse - chez les Bouchers, il est acceptable de conter pendant les repas.

« Cela se passa il y a deux jours. Nous étions en Khanduras, et nous venions du Nord, longeant les collines en dessous desquelles nous dînons à présent. Notre petite troupe fit halte ce soir là, près d'une grotte, dont l'entrée était très similaire à celle du Passage Souterrain. Bien que les instructions du Seigneur de la Terreur m'indiquaient de continuer vers le Sud, cette ouverture surprenante m'intrigua. Aussi, avec deux amis, nous décidâmes d'explorer le lieu.

« La grotte n'était pas très profonde mais aboutissait à une autre ouverture. De là nous prîmes un sentier qui slalomait à travers la colline. Il y eut une longue montée. Hormis le ciel étoilé, notre chemin avait tout d'un souterrain : pas de plantes, des roches humides et froides... Lorsque nous fûmes à une hauteur considérable, nous aperçûmes une clairière, nichée au creux de deux collines, comme protégé par une muraille de roches. Notre étonnement s'accentua lorsque nous nous rendîmes compte qu'ils s'y baladaient de grandes créatures, bipède, mais à l'allure de vache, armées d'hallebardes gigantesques.

« Un de mes Bouchers trébucha alors sur un os qui dépassait. Nous le déterrâmes. Nous ne savions pas vraiment d'où il pouvait provenir. C'est alors que sur une pierre, nous aperçûmes des inscriptions ensanglantés :

'Ici git ma jambe gauche, arrachée par un Bovin de l'Enfer ! La créature est morte, quelques mètres plus bas, tuée par mes propres mains !'

« Puis ile récit continuait plus longuement sur une autre facette de la roche :

'C'est donc cela, La Ferme ! Les rumeurs disaient vraies ! Pourtant, nulle ne parlait de la malédiction qui hante dans ce lieu... Moi-même en ai fait les frais. Cependant, j'ai découvert un objet de valeur.'

« Et quelques mètres plus loin, on lisait :

'Lors de mon combat avec le démon, j'ai trébuché sur une rocaille... La relique s'est enfoncée dans la cuisse de ma jambe droite. Je n'ai pas encore parvenu à la retirer...'

« Et finalement :

'Je vais mourir. Mon nom est Wirt.'

« L'écriture était alors nettement moins lisible. Peut-être sa prédiction s'est-elle révélée exacte ? Nous n'avons cependant rien trouvé de son cadavre, excepté la jambe qu'il avait enterrée. En revanche, nous sommes tombés sur le squelette du démon, dont le crâne était fracassé par une énorme roche. Etait-ce là l'oeuvre de Wirt ? Tout semblait l'indiquer. Nous ne sommes pas allés plus loin, car le sentier nous aurait menés à ce lieu qui s'appelle « La Ferme ». Je décidai de rebrousser chemin, malgré toute la curiosité dont j'étais épris. Quelle était donc cet endroit ? Qui donc l'avait construit ? Maudit ? Ou encore, qui était Wirt ? Et quelle est la nature de l'objet qu'il enfonça dans sa cuisse ? Avait-elle des vertus magiques ? Nous cherchâmes pendant une longue heure le reste du corps de Wirt, en espérant trouver sa seconde jambe. Il n'en fut rien.

« Alors que nous quittions les lieux, j'entendu un son étrange, comme un murmure dans une langue inconnue. Du sentier qui menait à la Ferme surgit une figure grotesque, armée d'une de ses grandes hallebardes, à peine capable de maintenir son équilibre. Elle sembla tomber et dans sa chute, elle vira son arme et décapita un de mes compagnons, avant de se relever et de se tenir parfaitement sur ses deux jambes. Tout le geste avait été accompli dans un élan continu. On aurait dit que le bovin dansait...

« Nous courûmes sans plus attendre pour échapper à la bête, terrifiés par la vision cauchemardesque et absolument démente qui nous était apparue dans les ténèbres de la nuit. Cette créature n'était même pas démoniaque, elle était absolument ridicule. Elle nous suivait sur le sentier, montant, descendant, son arme tendue vers la Lune, comme si un fil l'y attachait - c'était cela : on aurait dit un pantin !

« Dépêche-toi, détritus de l'Enfer ! »

« La hache du monstre tomba nette, une vague de sang m'éclaboussa. J'étais seul à présent. La bête s'approcha de moi, les yeux virés vers le ciel, chancelante, comme ivre, mais prête à frapper. Je lui montrai mon sabre. Son arme tomba, je l'esquivai ; je ressentis la force du choc tandis qu'il heurtait le sol avec une force phénoménal. Avec vivacité, je lui enfonçai mon sabre dans le dos. La bête poussa un murmure, à nouveau dans sa langue étrange. Mon coup ne semblait pas l'avoir affecté. Elle se releva haute et puissante devant moi ; et l'éclair gronda !

'Je suis Rakanishu, le Boucher !
- Meuh, meuh ?'

« La foudre frappa alors la falaise, à quelques mètres au-dessus de nous ! Il y eut un éboulement et le bovin reçu un énorme rocher sur la tête ! Je m'en sortais cependant avec quelques égratignures et avec une grande de confusion. Lorsque j'eu repris mes esprits, je vis le monstre étalé sur le sol, sa tête complètement éclatée. Je retrouvai mes autres compagnons et leur racontai les étranges événements qui s'étaient déroulés cette nuit là. Comme nous n'avions pas de Shaman, nous ne pûmes ramener nos compagnons à la vie. Cependant nous prîmes soins de récupérer le corps de la bête.

« Ainsi s'achève donc le récit de notre chasse, dans lequel la chance joua un des rôles principaux, au côté de l'étonnant. »

« C'est effectivement une historie étrange, reprit Bishibosh. Moi-même n'ai connaissance de cette Ferme... Est-ce le travail d'un homme ou d'un démon ? »

Ce récit suscita l'enthousiasme général. De nombreuses théories furent proposées sur l'origine de ces bêtes, beaucoup d'entre elles assez absurdes... Comme quoi, cette historie suscitera toujours d'étranges rumeurs.

Lorsque les Déchus eurent fini de manger, ils décorèrent les murs de la grotte, se remémorant les divers récits de leur vie, telle qu'elle avait été, depuis la chute des Trois Frères. Rakanishu raconta longuement ses aventures, au cours desquelles la chance prenait souvent part, d'ailleurs. Bishibosh l'écoutait attentivement et admirait secrètement la fierté avec laquelle il parlait de son cheminement à travers Sanctuary. Lorsque Rakanishu le regardait, il feignait le sommeil, de peur qu'on lui demande à son tour de conter.

Il n'était pas d'humeur à cela. Il était à son aise, assis contre une roche plate. Le feu était doux et les récits de Rakanishu le berçaient. Il aimait aussi la frêle agitation avec laquelle ses compères s'adonnaient à leur travail artistique. Tout allait pour le mieux. Pour la première fois depuis toujours, l'immortalité ne l'inquiétait plus : il avait trouvé l'occupation parfaite.

C'était une joyeuse fête.

Le lendemain, le Seigneur de la Terreur l'appelait à nouveau.
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