Fanfiction Diablo II

« Encore un nourrisson, Maître ? »

En temps normal, j'adorerais reprendre de cette viande délicate aux os croustillants, mais je ne suis vraiment pas dans mon assiette aujourd'hui. « Non merci, fidèle Blood Lord, mais je n'ai pas faim. » Je repousse le vampire qui me tend l'enfant mutilé, et me détourne d'un autre servant qui m'offre un bol de sang de vierge fumant. « Non, rien vraiment. Le trajet jusqu'aux Enfers n'est jamais agréable... J'ai peur que ce soit pire l'estomac plein. »

« Mais Maître, vous ne savez pas encore si vous redescendez aujourd'hui. Peut-être vous laisseront-ils un moment de répit... »

Je savais qu'ils ne le feraient pas... Ils ne le feront jamais. Tout est réglé comme une horloge : chaque fois que je mets les pieds sur le plan des mortels, un héros quelconque se précipite dans mon sanctuaire, me tue et me pique mes affaires, tuant la plupart de mes serviteurs au passage. Ce n'est généralement qu'une question de minutes avant que le suivant ne vienne piller mon domaine. De temps en temps, mes servants et moi pourrions les mettre au pas, mais depuis que Bremm ne peut plus invoquer ses puissants éclairs, le nombre de héros qui nous surpassent a grandi dangereusement. J'entends une déflagration à l'étage au-dessus ; ça a déjà commencé. Les vampires qui gardent l'entrée n'offrent en général qu'une résistance symbolique, et je peux déjà entendre leurs corps tomber en poussière.

« Bremm, essaie de t'en occuper s'il te plaît. » dis-je à mon meilleur lieutenant, bien que je sache que ce soit vain... Même s'il réussit à tuer un de ces héros, ceux-ci se débrouillent toujours pour se réincarner spontanément et rappliquent aussitôt, à nouveau équipés de pied en cap, pour massacrer mes troupes. Bremm et sa bande se précipitent vers l'entrée, mais ils y trouvent les deux lames d'un Barbare tournoyant. Son nom est Gur'chek, et il m'a déjà tué quatre fois. C'est de moi qu'il tient ses deux épées, bien qu'en y repensant je ne vois pas ce que je pouvais bien faire avec... Je n'utilise jamais d'épées, ni aucune arme ou armure d'ailleurs. Je ne sais pas... Je suppose que c'est simplement par amour des belles choses. Je viens juste de ramener ce sympathique casque des Enfers, et je sais que ce Barbare veut me le piquer.

Plusieurs des équipiers de Bremm meurent du tourbillon rapide des épées du Barbare, mais Bremm réussit à survivre et invoque plusieurs hydres . Les reptiles de feu crachent leur magma soufré sur le guerrier, mais ça n'a aucun effet. Il ne se soucie pas d'avantage que Bremm soit encore en vie. Il court simplement vers la plate-forme centrale et saute par dessus les douves sanglantes. La seconde suivante il se tient devant moi, les épées tirées, une lueur folle dans les yeux. Il crie bruyamment, donnant des ordres de bataille à... bon, à lui-même, j'imagine. De l'auto-encouragement ? Allez, je ne dois pas me laisser faire... Je peux au moins trouver quelque chose de nouveau et d'astucieux à lui lancer dans ces derniers moments de ma vie.

« Vous arrivez trop tard ! Hahahahaha ! »

Grandiose ! La même satanée phrase que la dernière fois. Ca et « Mes frères vous ont échappés » sont tout ce que je peux trouver à dire, pour je ne sais quelle raison. La dernière fois j'en ai parlé à Lord De Seis (il était un brillant psychanalyste de son vivant) et il m'a dit que c'était le signe d'une colère réprimée, puisque mes frères s'échappent A CHAQUE FOIS, tandis que je reste à me faire tuer, alors que si le héros n'étaient pas systématiquement en retard, nous serions tous les TROIS dans la salle et nous lui botterions proprement le cul.

Avant que je puisse faire quoi que ce soit, les épées sont déjà en train de me lacérer les chairs, et des morceaux de moi tombent sur le sol. Encore deux passages et je suis mort, tourbillonnant comme une feuille morte dans le puits ardent qui mène aux Enfers. Je peux presque voir le petit sourire satisfait qui se dessine sur le visage de Gur'chek pendant qu'il essaye MON nouveau casque... Oh après tout, je pourrais toujours récupérer un petit quelque chose chez Héphasto pendant que j'y serai. La descente n'est vraiment pas agréable, et j'y laisse un peu de mon déjeuner.

J'atterris et, m'attendant là, au milieu des laves brûlantes qui sont son foyer, se tient mon cher petit frère Diablo, regardant sa montre gousset... Ce n'est pas vraiment une montre gousset, mais elle ne pourrait jamais tenir à son poignet, et de toutes façons il y a encore un poignet à l'intérieur.

« Nouveau record, Meph... Je te le dis mec, tes douves ont besoin d'un GROS élargissement. »

« Par l'enfer, D, je n'ai pas besoin de douves plus grandes, j'ai besoin d'un meilleur système de sécurité. Tous les deux avec Baal vous avez tant de niveaux de sécurité... Tu as les cinq sceaux, Baal a les cinq vagues de servants, y compris ses fameux Serviteurs de la Destruction... »

« Ouais, ils sont chouettes. »

« ... Alors que moi j'ai trois fanatiques-démonisés, quelques vampires, et un fossé avec un peu de sang caillé au fond. »

Nous commençons le trajet vers le portail dont je dois garder l'extrémité terrestre pour éloigner ces apprentis héros. Avant, mon seul amusement était de massacrer ces idiots arrogants et faibles, mais maintenant ils s'entraînent et m'ignorent jusqu'à ce qu'ils soient suffisamment puissants et expérimentés pour pouvoir me tuer en quelques secondes, juste pour me piquer mes affaires.

« Alors comme ça Bremm n'assure toujours pas ? »

« Non. Je lui dis que ça arrive à beaucoup de démons, mais ça ne l'aide pas. Il sort toujours des ''Parfait, Bartuc a encore son envoûtement éclair'' aigris. Je ne sais pas quoi faire, il a si peu confiance en lui... »

Nous nous arrêtons à l'échoppe d'Héphasto, et il me montre quelques nouveautés alléchantes. Je jette un oeil sur une boîte dans un coin, mais il secoue la tête. « Je ne peux pas distribuer ça... des Anneaux Constricteurs, ils ont été bannis. Soyez raisonnables, ils vous rongent jusqu'à ce que vous soyez aussi inoffensif qu'un éplucheur à légumes. » Je regarde le marteau de Heph et je frissonne en pensant à la quantité de mes pierres d'âme écrasées sous ce truc... Ces mortels pensent qu'ils peuvent me stopper pour de bon, mais soyons sérieux, il y a des tonnes de ces trucs partout. Sur le point de prendre une épée écarlate appelée « Lettre de sang », je m'arrête en y cherchant l'intérêt. Je veux dire, je ne la garderai pas cinq minutes avant qu'une tête brûlée ne vienne me la voler... Je prends donc à la place un assortiment de chapeaux magiques minables et de dagues piteuses... Rien qu'un héros qui se respecte utilisera jamais. Peut-être que ça les tiendra éloignés. Mon jeune frère remarque ce que je suis en train de faire.

« Ecoute Meph, je ne pense pas que le problème soit l'équipement que tu trimballes. Allons, Baal et moi avons un équipement bien supérieur, et les gens sont loin d'essayer de nous tuer aussi souvent que toi. »

« C'est à cause de ce que je suis, c'est ça ?, dis-je. Je veux dire, tu es le Seigneur de la Terreur, donc naturellement tout le monde a peur de toi... »

« Naturellement. »

« Et Baal est le Seigneur de la Destruction, donc il détruit tous ceux qui se mesurent à lui... »

« Enfin, moi je peux lui botter le cul. »

« Mais moi, Je suis le Seigneur de la Haine... Donc tout le monde me hait ! Je me sens si... J'sais pas... »

« Ecoute mec, Je sais que c'est dur d'être là où tu es, mais il faut que quelqu'un garde tout le boxon hors de l'Enfer. Moi, on a besoin de moi ici pour terroriser les démons inférieurs et les soumettre. Baal a son truc à faire dans le Nord, et donc tu es le seul qui reste. C'est ton propre plan, mec, et c'est un bon plan. »

« Je sais bien, mais... »

« Ecoute, je sais que c'est dur d'être tué si souvent, mais de nous tous c'est toi qui a le meilleur look. Regarde moi. Franchement, ce rougeoiement est d'un goût... »

« Enfin, ouais, je suppose... »

« Regarde, je ne suis qu'un gros truc ressemblant vaguement à un dinosaure. Et Baal ? On dirait une espèce d'araignée-crabe boiteuse ou je ne sais quoi... Il était même plus cool quand il était dans Tal Rasha ! »

« C'est vrai qu'il a l'air stupide... » dis-je en riant

« Oui... mais toi, tu es vachement cool. »

« Ouais, j'imagine que je le suis. »

Nous approchons du portail sombre qui me ramènera à la prison. Il y a là, à m'attendre, mes serviteurs qui étaient morts à la dernière attaque, y compris Bremm qui a donc apparemment été tué après que je le sois.

« Tout ira bien ? », me demande Diablo.

« Ouais. Ouais, ça va aller. »

« Hey mec, c'était sympa de te revoir. Au fait, la prochaine fois que tu descends, peut-être que tu pourrais ramener une ou deux femmes enceintes ? On ne peux jamais avoir de bébés frais ici. »

« Je verrai ce que je peux faire. A bientôt, D. »

« Fais gaffe à toi. »

Après une poignée de main virile avec mon frère, mes serviteurs et moi passons le portail rougeoyant. Le voyage de retour n'est pas moitié aussi désagréable que l'aller, et nous arrivons quelques secondes plus tard. Après avoir pris le temps d'attraper un amuse gueule, je repose l'homme hurlant (plus précisément l'eunuque hurlant, dorénavant) et m'installe à ma place, au fond de la pièce. Ce n'est pas facile de faire ce que je fais, mais il faut bien que quelqu'un le fasse... Et que je sois damné si je reste simplement assis à laisser ces morveux aller en Enfer sans combattre ! J'imagine que je suis damné de toute façon, mais vous voyez ce que je veux dire...

Avant longtemps, j'entends le son caractéristique d'une Ensorceleuse lançant un sort de nova dans l'entrée. Quelques secondes plus tard, elle apparaît devant moi. C'est une habituée, et bien que j'ai oublié son nom, je reconnais la Peau de Vipère Mage qu'elle porte. Elle était à moi... Je sais que je vais encore mourir, mais j'ai cette fois la satisfaction de savoir que tout ce qu'elle gagnera à ma mort n'est qu'une perte de temps aux reflets bleus. Je souris et cherche une bonne phrase pour railler sa déconfiture ;

« Vous arrivez trop tard ! Hahahahaha ! »